En apparence, ce sujet ne concerne pas directement les épargnants. Mais il a pourtant des conséquences directes et concrètes sur chacun d’entre eux : « Value for Money » ou comment une réglementation est en train de bouleverser en profondeur le marché de la gestion collective Française et des épargnants... Issue de la directive UE 2016/97 sur la distribution des produits d’épargne, cette règle est traduite en France sous forme de recommandations par l’APCR. Elle impose de mesurer le rapport « coût/bénéfice » de chaque produit d’épargne. Très concrètement, il s’agit de vérifier que les frais de gestion acquittés par l’épargnant quand il souscrit à un fonds soient justes et équilibrés, au regard des risques et des performances de ce fonds. Cela signifie que lorsqu’un fonds pratique des frais de gestion élevés, il doit pouvoir les justifier par le fait qu’il délivre des performances plus importantes.
Vu sous cet angle, « value for money » est une idée pleine de bon sens, destinée à protéger les épargnants des sociétés de gestion pratiquant des frais trop élevés sans qu’ils ne soient justifiés. Mais de la théorie à la pratique il y a souvent un monde...
Concrètement, les assureurs vie - qui détiennent une part importante de l’épargne des français – ont commencé depuis plusieurs mois à déterminer le montant moyen des frais de gestion qu’ils acquittent. A partir de cette moyenne, les fonds ayant les frais de gestion les plus élevés au regard d’un certain niveau de performance seront retirés de la liste des unités de compte référencées dans les contrats d’assurance vie sauf à pouvoir justifier d’une performance réellement très importante. Or, le problème réside dans leur manière de calculer les frais de gestion moyen. En effet, les assureurs mélangent à la fois les fonds « actifs », c’est-à-dire gérés par un gérant « humain », et les fonds « passifs », autrement dit basés sur des ETF qui sont des produits synthétiques répliquant des actifs réels. Or cette gestion « passive », fait appel à des machines. Ses frais de gestion sont donc, naturellement, plus faibles.
In fine, « value for money » désavantage donc les vrais gérants – essentiellement des sociétés de gestion françaises au passage – au détriment des « machines », qui sont majoritairement promues par des gestionnaires de fonds anglo-saxon.
A court terme l’épargnant n’est pas directement concerné par cette question et pourrait même y trouver un avantage si ses frais se réduisent. Mais à long terme, il pourrait se retrouver perdant lui aussi, pour au moins deux raisons : la première c’est que les ETF peuvent être des produits dangereux en cas de crise. En effet, comme ils se contentent de copier les indices existants, ils baissent dans les mêmes proportions que les marchés en cas de krach. Un gérant humain, dit « de conviction » est justement là pour acheter les valeurs dans lesquelles il croit, mais aussi gérer le risque en évitant de plonger dans les bulles, par exemple. Justement, et c’est le deuxième point : le gérant investit parfois dans des valeurs encore peu connues, il est là pour dénicher les pépites de demain et quelque part entretient la croissance des futures grandes entreprises. Ce qui n’est pas le cas des ETF qui investissent dans l’existant. Continuer à financer la gestion active c’est donc aussi pouvoir continuer à financer l’économie « réelle », à savoir des entreprises françaises.
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