Le Private Equity s’ouvre désormais à la clientèle particulière. Comment expliquer ce mouvement ?
La démocratisation rapide du Private Equity vers la clientèle privée s’explique par une conjonction de facteurs. Globalement, on retrouve un enjeu de financement de l’économie française. L’industrie du Private Equity et donc le financement des petites et moyennes sociétés non cotées dans les pays anglo-saxons se sont beaucoup développés grâce aux fonds de pension qui recherchent du rendement sur le long terme pour pouvoir financer la retraite de leurs cotisants. Mais en France nous n’avons pas ou peu de fonds de pension. L’épargne des français est plutôt logée dans l’assurance-vie qui était jusqu’à présent inaccessible pour les fonds de PE pour des raisons réglementaires. Cela limitait in fine la capacité des ménages français à financer les Petites et Moyennes Entreprises qui sont pourtant très importantes pour la croissance et l’emploi. Le deuxième sujet est une question d’équité : le PE est une classe d’actifs assez récente mais qui a gagné ses lettres de noblesse depuis une vingtaine d’année, et qui a toujours surperformé les autres classes d’actifs. Il y avait donc une forme d’inégalité à ne pas permettre aux particuliers d’y accéder, et de la réserver aux investisseurs institutionnels, alors qu’elle a quelques vertus : la diversification (qui est indispensable pour l’épargne) ou encore une moindre volatilité par rapport à la bourse. C’est pour cela qu’est arrivée la loi Pacte en 2019 qui avait pour objectif de réorienter une partie de l’épargne des ménages vers le financement de l’économie et en particulier le tissu de PME et d’entreprises de taille intermédiaire. Ceci poussait naturellement à poursuivre la démocratisation du Private Equity.
Désormais, les contrats d’Assurance-vie peuvent contenir des UC en Private Equity ?
Tout à fait. L’Assurance-Vie est une épargne longue qui se prête très bien à un investissement dans le Private Equity, long par nature lui aussi. La performance d’un investissement en Private Equity ne s’obtient pas en six mois, il faut plusieurs années pour y parvenir. Le potentiel de croissance de ce marché est très important : l’Assurance-Vie représente près de 2000 milliards d’euros d’encours alors que le non coté français, en incluant tous les segments, se traduit par seulement 40 milliards d’euros de levées de fonds par an.
N’y-a-t-il pas un risque d’illiquidité avec le Private Equity ? Nous avons aujourd’hui la possibilité de créer des fonds perpétuels dit « evergreen » très attractifs pour l’assurance-vie car on peut y rester investi pendant plusieurs dizaines d’années, ce qui est très flexible pour les assuranceurs-vie. Des fonds qui sont par ailleurs généralement « semi-liquides », c’est-à-dire qu’on peut entrer ou en sortir périodiquement, dans certaines limites. Par exemple, notre fonds Apeo créé en novembre 2020 assure jusqu’à 10% de liquidité par an (c’est-à-dire qu’on peut retirer chaque année jusqu’à 10% de ses fonds). Mais surtout l’avantage de passer par l’assurance vie, c’est que si un particulier a besoin de récupérer tous ses fonds, l’assureur se porte garant de la liquidité comme pour tout contrat d’assurance vie « normal » et vient éventuellement en complément de la liquidité partielle offerte par le fonds sous-jacent. L’intérêt au final c’est d’avoir rendu liquide une classe d’actif par nature illiquide.
Comment limiter ses risques avec cet investissement ?
La première règle qui est valable dans toutes les classes d’actifs consiste évidemment à diversifier ses placements. Nous conseillons généralement de ne pas mettre plus de 10% à 15% de son épargne en Private Equity, à moins d’être particulièrement aisé. De même, il convient de diversifier le choix des gérants car tous n’ont pas tous la même stratégie : le non coté est un univers très vaste avec des profils risque-rendement très différents qui conviennent à certains clients et pas à d’autres.
Quelles sont les perspectives de ce marché ?
En 2021, le Private Equity français au sens large a levé 500 millions en assurance-vie et la collecte double quasiment chaque année, avec un potentiel immense. Il est également en train de pénétrer le marché du PER, car nous sommes là aussi dans de l’épargne longue. Il faut démystifier cette classe d’actif ! Le « Private Equity » donnait jusqu’à récemment l’impression d’être réservé à une certaine élite mais pourtant, fondamentalement, c’est très simple : il s’agit toujours d’investir dans des sociétés, sauf que dans notre cas elles ne sont pas cotées. Il faut expliquer aussi nos particularités et nos forces. Notre sélectivité et nos audits sont plus poussés que les investisseurs en bourse. Nous sommes également des investisseurs actifs. On apporte du capital financier mais aussi du capital humain. L’enjeu, pour nous, consiste à accompagner et accélérer le développement des sociétés. Il y a certes un risque de perte en capital, comme en bourse, mais que les fonds peuvent minimiser par la diversification des portefeuilles. Et surtout nous décidons quand vendre et à qui, ce qui permet de maximiser les produits de cession et donc la performance de nos fonds.
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